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ESPÈCES MENACÉES

un film de Gilles Bourdos.

 

Ils se marient dans l’allégresse mais, dès la nuit de noces, quelque chose d’étrange et de menaçant se révèle. Le jeu bizarre qu’impose Tomasz (Vincent Rottiers) à Joséphine (Alice Isaaz) durant leur lune de miel (qui serait plutôt lune de fiel) aurait dû lui mettre la puce à l’oreille et l’avertir d’un potentiel danger. Mais comment pourrait-elle admettre, alors qu’elle vient à peine de se marier, que l’individu avec qui elle doit partager sa vie ne va pas tarder à la faire entrer en enfer ? Un an plus tard, le piège s’est refermé et la voici incapable de se libérer d’un mari violent et de renouer avec ceux qui voudraient la sauver, à commencer par son père Joseph (Grégory Gadebois).

Gilles Bourdos et son coscénariste Michel Spinosa ont puisé cette histoire tragique dans un ensemble de nouvelles écrites par l’Américain Richard Bausch. Et ils y ont trouvé la matière d’autres récits tout aussi émouvants, faisant s’entrecroiser et, parfois, se rencontrer les destinées des différents protagonistes. Outre l’histoire commune de Tomasz et Joséphine, l’on croise aussi celle d’un couple de parents (Eric Elmosnino et Agathe Dronne) en instance de séparation et apprenant, atterrés, que leur fille (Alice de Lencquesaing) souhaite se marier avec un universitaire de 40 ans plus âgé qu’elle (il a 63 ans !) qui l’a déjà mise enceinte. Et l’on découvre aussi le portrait touchant d’un étudiant timide (Damien Chapelle) devant prendre soin de sa mère hospitalisée en psychiatrie et cherchant à combler le vide de son existence en trouvant l’âme sœur (y compris en recourant absurdement et désespérément à un service de téléphone rose !).

Grâce aux formidables talents conjugués des actrices et acteurs (il n’y a pas la moindre fausse note), ces récits de solitudes, de maladresses, de souffrances données ou reçues procurent de constantes émotions. Le film prend même, parfois, une allure quasi fantastique (comme lorsque des milliers d’insectes s’échappent d’un lampadaire que réparent des cantonniers).  Les destinées entremêlées des personnages ne peuvent qu’émouvoir fortement, la plus large part étant consacrée au couple formé par Tomasz et Joséphine. La détresse de celle-ci est le pivot du film. Que faire quand on est le témoin de violences conjugales, quand on sait qu’une épouse est la victime d’un mari violent et qu’elle ne trouve pas l’énergie de se révolter ? Et comment s’y prendre quand on est le père de la jeune femme en question ? Dans ce rôle d’un père qui veut à tout prix protéger sa fille, Grégory Gadebois fait une prestation particulièrement bouleversante.

NOTE:  8/10

Luc Schweitzer, ss.cc.